Comment optimiser la ventilation mécanique au bloc opératoire
Voici un article que je voulais écrire depuis longtemps! Quand j’étais encore un jeune interne insouçiant, je m’embrouillais souvent avec les réglages du respirateur : quel volume courant mettre? quel niveau de PEEP? quelle Fi02? Comme tout apprenti , j’ai reproduit ce que j’ai observé et ce que j’ai pu voir. Au début c’était un peu le bordel, je calculais vaguement le volume courant en fonction du poids, et chez les patients qui avaient de l’embonpoint, bah c’était freestyle!! La PEEP je savais pas trop, je la mettais à 5 comme tout le monde! C’est alors que je suis arrivé au CHU, dans un certain bloc ou un certain chef avait horreur des choses toutes faites et du « c’est pour tout le monde pareil » (certains d’entre vous,qui travaillez dans mon CHU, vont peut être le reconnaître!!). Combien de fois je l’ai entendu râler « Mais Bordel qui m’a encore mis du 500 par 12 sur le respirateur….faut réfléchir parfois! » ou encore, en parlant d’un polytraumatisé qui venait d’arriver « Et bah voila, c’est encore du beau travail, un rose qui passe à moitié et un respi réglé sur du 500 par 12….pff les périphs…. »
Bon je caricature un peu hein, mais ce qu’il voulait dire par là c’est que la suprématie du 500ml x 12 doit cesser. Il y a pas si longtemps que ça on ventilait encore les patients avec des énormes volumes courants et aucune PEEP. L’optimisation de la ventilation au bloc opératoire est une idée récente, dérivée de la ventilation du SDRA.
Chaque patient est différent et la ventilation mécanique n’est pas quelque chose d’anodin. Il faut donc réfléchir à comment on peut optimiser la ventilation et à changer nos pratiques. Pour ma part j’ai voulu avoir cette réflexion, car au début, quand je savais pas, bah je faisais ce qui était affiché sur l’écran du respirateur comme réglages de base: Vt 500 ml ; FR 12 ; PEEP 5 ; Fi02 50%
Et un jour je me suis dit: plus jamais ça!
(Attention article kilométrique…allez vous prendre un Red Bull pour rester concentré! Ou optez pour une solution plus radicale….)
Un peu de Physiologie,pardi!
Afin de comprendre la suite de mon exposé, je vous invite à lire ce « bref » rappel de physiologie respiratoire.
- Les volumes pulmonaires et la relation cage thoracique/poumon
Certaines définitions sont importantes à connaître afin de comprendre la formation des atélectasies et les moyens de prévention. Ce sont celles de la CRF, du Volume de Fermeture et du rapport ventilation/perfusion.
La cage thoracique est soumise à des forces expansives, tandis que le parenchyme pulmonaire est soumis à des forces rétractiles. Si on explante un poumon, le parenchyme pulmonaire va se rétracter, tandis que la cage thoracique augmente de volume.
En condition physiologique, le parenchyme pulmonaire est rendu solidaire à la cage thoracique par la dépression pleurale (c’est pour ça qu’en cas de pneumothorax = annulation de la dépression pleurale, les deux éléments que sont la cage thoracique et le poumon sont dissociés et donc le poumon se rétracte). La force expansive de la cage thoracique et la force rétractile du poumon s’annulent entre elles et définissent un point d’équilibre, qu’on appelle la CRF.
La CRF (Capacité Résiduelle Fonctionnelle) est le volume d’air dans le poumon qui reste après une expiration normale. Etant donné que l’expiration est passive, du fait de l’élasticité du parenchyme pulmonaire et de la rigidité de la cage thoracique, la CRF correspond à « l’état de base » du poumon avant une inspiration.
Le volume de fermeture, est un volume critique. Si le volume des alvéoles pulmonaires devient inférieur à ce volume de fermeture, ces alvéoles se ferment. Or le volume des alvéoles au repos correspond à la CRF. Donc si la CRF devient inférieure au volume de fermeture, l’alvéole se ferme, c’est une atélectasie.
Ce volume de fermeture est proche du volume résiduel chez le sujet jeune. Il augmente au cours de la vie pour atteindre la CRF chez le sujet âgé.
Plusieurs situations peuvent influencer la valeur du volume de fermeture, notamment l’âge et le statut tabagique du patient.
- Inégalité de ventilation et de perfusion
Au sein du poumon, la ventilation et la perfusion n’est pas identique en tout point.
Le poids que le poumon exerce sur les bases pulmonaire et le diaphragme explique que les bases soient moins bien ventilées. En effet du fait de la gravité = la pression positive exercée par le poids du poumon, la dépression pleurale est moins négative aux bases pulmonaires qu’au apex. Ceci a pour conséquence que les alvéoles des bases soient moins aérées et plus comprimées.
A l’inverse, les bases sont mieux perfusées que les apex. Ceci est expliqué par les zones de West. Aux bases, la pression régnant dans le capillaire est plus importante que la pression alvéolaire, car il existe un gradient apico-basal (en position debout) de la pression hydrostatique au niveau des capillaires. La pression hydrostatique dans les capillaires est plus importante au niveau des bases qu’aux apex.
Cette notion d’inégalité de ventilation et de perfusion est importante, car elle permet de comprendre la physiopathologie des atélectasies et leurs conséquences.
- L’équation du mouvement respiratoire et la relation pression/volume
En ventilation contrôlée, la pression des voies aériennes est régie par l’équation du mouvement respiratoire. Cette équation est importante à connaître, elle nous aide pour comprendre la ventilation, notamment chez les patients asthmatiques, BPCO ou en SDRA.
Paw = Po + 1/C x V + R x D
Paw = Pression des voies aériennes Po = Pression télé-expiratoire =PEEP +/- autoPEEP C = compliance
V = Volume courant R = Resistances inspiratoires D=Débit d’insufflation
(Schéma pression des VAS)
On peut la décomposer en 2 parties : La pression élastique et la pression résistive
La pression élastique est la pression qui règne dans les alvéoles pulmonaires en fin d’inspiration. Elle est donc fonction du volume insufflé par rapport à la compliance des poumons, c’est-à-dire la « tension » qui s’applique sur les poumons quand vous insufflez de l’air. C’est comme si vous prenez un ballon de baudruche, au début quand vous le gonflez il est tout mou, la compliance est très élevée = vous pouvez insuffler un grand volume d’air sans que la pression dans le ballon change énormément. Une fois qu’il est bien gonflé et tendu, si vous insufflez encore un petit volume d’air, la pression dans le ballon va augmenter brutalement, la compliance est alors très faible.
La pression élastique est donc : Po + Volume courant / Compliance
Po correspond à la PEEP totale, qui participe donc à la pression qui règne dans les alvéoles.
C’est cette Pression élastique qui nous intéresse particulièrement, car elle correspond à la pression de plateau et intègre le Volume Courant et la Compliance pulmonaire dans son équation.
L’autre partie de l’équation correspond à la Pression Résistive. C’est la pression liée à la résistance des voies aériennes, autrement dit la Pression de Crête.
Plus le calibre des voies aériennes est petit, plus la pression résistive va être haute. Plus le débit d’insufflation est élevé, plus la pression résistive va être importante.
Cette pression résistive s’écrit donc : Débit Inspiratoire x Résistances des Voies Aériennes
C’est cette équation qui va nous permettre de comprendre le réglage de la ventilation chez l’asthmatique par exemple. Etant donné que la résistance de ses voies aériennes est élevée, la pression résistive va être importante. Donc la Pression de Crête va atteindre des valeurs très importantes. Mais cela n’a pas d’importance étant donné que cette pression est celle qui règne dans les voies aériennes qui ne participent pas aux échanges gazeux (ce n’est pas celle des alvéoles = pression de plateau). Donc il va falloir augmenter le seuil d’alarme de la pression de crête, augmenter le débit inspiratoire et surveiller plutôt la pression de plateau pour rechercher un phénomène de trapping….mais je m’éloigne du sujet.
Revenons à la pression élastique. On a vu qu’elle est fonction de la PEEP totale, du volume courant et de l’inverse de la compliance, qu’on appelle aussi elastance (= 1/compliance).
Donc plus cette compliance est basse, plus la pression élastique (= pression de plateau) va être élevée. C’est ce qu’on voit dans le SDRA par exemple, le parenchyme pulmonaire est tellement œdématié, inflammé, fibrosé, que la compliance est très faible et que la pression de plateau augmente très rapidement malgré une faible augmentation du volume courant. Je rappelle que la limite supérieure de la pression de plateau est de 30 cmH20.
C’est pourquoi l’observation de la compliance est primordiale pour évaluer l’état du parenchyme pulmonaire et son évolution, afin de pouvoir adapter sa stratégie ventilatoire. Les valeurs normales de la compliance chez le sujet sain sont de 60-200 ml/cmH20 (si on insuffle 60 à 200ml d’air, on génère une pression de 0.6 à 1 cm H20). Dans le SDRA la compliance est < 50ml/cmH20 voire < 30ml/cmH20.
- Courbe Pression-Volume
Comment peut-on évaluer la compliance ?
On a vu que la pression élastique est fonction du volume courant et de l’inverse de la compliance. Donc la compliance correspond au rapport entre le volume courant et la pression dans les alvéoles
Compliance = Vt / (Pplateau – PEEPtot)
Avec cette équation en tête, on peut la calculer manuellement en faisant une pause télé-inspiratoire pour avoir la pression de plateau et une pause télé-expiratoire pour avoir la PEEP totale.
Les nouvelles machines d’anesthésie permettent maintenant de la calculer. Pour ce faire il faut aller regarder les courbes pression-volume. La compliance correspond à la pente entre la PEEP et la Pression de plateau.
A noter qu’il existe une compliance dite « dynamique » avec un calcul basé sur la Pression de crête et une compliance dite « statique » ou le calcul est basé sur la pression de plateau
Il est utile d’enregistrer ces courbes pression-volume au début d’une anesthésie, car elles vont servir de référence au cours de la chirurgie. On pourra alors comparer l’évolution de la compliance, surtout au cours des chirurgies qui l’altèrent significativement (Cœlioscopie, Chir abdo ….)
Physiopathologie des atélectasies peropératoires et du « Ventilation Induced Lung Injury »
La période périopératoire est une grande pourvoyeuse de complications pulmonaires, qu’elles soient mécaniques ou inflammatoires. Dans la littérature on retrouve une incidence de complications respiratoires postopératoires de 5-10% toutes chirurgies confondues et de 9-40% pour les chirurgies abdominales. En moyenne ces complications respiratoires ont un pic d’incidence à J+3 en postopératoire.
Chez un sujet sain, la CRF et la compliance pulmonaire ne sont pas constantes, elles dépendent de sa position. Elles diminuent en position allongée par rapport à une position debout.
Après l’induction de l’anesthésie générale (qu’elle soit avec des halogénés ou des hypnotiques IV), la CRF et la compliance pulmonaire sont considérablement réduites. L’effet sur la CRF de la position allongée s’ajoute à la réduction de la tonicité des muscles respiratoires, qui induisent une migration céphalique du diaphragme et une modification de la conformation de la cage thoracique. Tous ces mécanismes aboutissent donc à une réduction de la CRF (donc du volume pulmonaire de repos) de 15-30%, qui dans certaines zones pulmonaires devient inférieure au volume de fermeture des alvéoles et qui donc aboutissent à la formation d’atélectasies. Se surajoutent ensuite l’effet de la curarisation (qui diminue encore la tonicité des muscles respiratoires et du diaphragme), la cœlioscopie et la laparotomie qui vont encore plus repousser le diaphragme de manière céphalique. Par ailleurs chez l’obèse et le sujet âgé, qui ont une CRF réduite ces effets sont encore plus important. Chez l’obèse morbide la réduction de la CRF sous AG peut atteindre 50%. Chez le sujet âgé, étant donné que son volume de fermeture est plus important que chez le patient jeune, il est plus sujet aux atélectasies.
Ces atélectasies vont se situer principalement au niveau des zones les moins bien aérées, donc en décubitus dorsal, les zones postéro-basales.
Ces atélectasies vont être responsables d’anomalies du rapport ventilation/perfusion par la création d’un shunt. En effet les alvéoles atélectasiées sont perfusées mais non ventilées. La composition du gaz alvéolaire va se rapprocher de celle du sang veineux mêlé, et va donc être responsable d’une hypoxémie. C’est là où on fait une erreur fréquente. Pour traiter cette hypoxémie on augmente la Fi02. Or l’apport d’oxygène ne permet pas de corriger l’hypoxémie d’un shunt vrai. L’apport d’oxygène se fera uniquement au niveau des alvéoles bien ventilées, ou l’hémoglobine est déjà saturée en oxygène. (La part d’oxygène dissoute dans le sang est faible comparée à celle liée à l’hémoglobine dans la prise en compte de la Pa02). Par ailleurs, cette augmentation de la Fi02 va elle-même créer de nouvelles atélectasies par résorption. Cet effet est bien connu, l’excès d’oxygène induit des atélectasies de résorption. Donc au final, au lieu de corriger l’hypoxémie, on ne fait que l’aggraver. C’est un cercle vicieux.
Bien entendu lorsque la Pa02 passe en dessous de 50 mmHg, la vasoconstriction pulmonaire hypoxique se met en route et va rediriger le sang vers les alvéoles bien ventilées.
A noter que ces atélectasies apparaissent dès l’induction de l’anesthésie et persistent même plusieurs jours après celle-ci. Ces atélectasies vont donc être responsables de complications pulmonaires postopératoires, comme une hypoxémie, une détresse respiratoire et des pneumopathies (même si le lien de causalité au niveau clinique est encore difficile à prouver, car plusieurs facteurs confondants existent dans la génération de pneumopathies postopératoires).
Pour l’instant je vous ai parlé des complications mécaniques de la ventilation mécanique. Or il est maintenant bien prouvé que la ventilation mécanique induit aussi des lésions inflammatoires au niveau pulmonaire, qu’on regroupe sous le terme de « VILI » (Ventilation Induced Lung Injury). Deux mécanismes sont responsables de ces lésions : en premier, l’ouverture et la fermeture cyclique des alvéoles induisent un des lésions de « cisaillement » et une inflammation qui peut se propager jusqu’à provoquer un SDRA. Ce cycle de fermeture complète de l’alvéole puis de réouverture à chaque cycle inspiratoire lèse la structure cellulaire des alvéoles, qui vont relarguer pleins de cytokines pro-inflammatoires.
L’autre mécanisme impliqué est la surdistension des alvéoles non atelectasiées. Comme je l’ai dit précédemment les atélectasies induisent des inégalités au niveau de la ventilation. Etant donné que les alvéoles atélectasiées sont fermées, le volume insufflé va être redirigé vers les alvéoles déjà ouvertes qui vont donc être surdistendues. Par analogie avec le ballon de baudruche de toute à l’heure, c’est comme si vous souffliez dans un ballon déjà bien gonflé. On comprend bien que ce n’est pas très bon pour l’alvéole, il y a un risque de volotraumatisme. Cette surdistension va être également responsable du relargage de cytokines pro-inflammatoires.
On a donc un volotrauma (surdistension des alvéoles) un atelectrauma (réouverture cyclique des alvéoles et atélectasies) et un biotrauma (cytokines pro-inflammatoires).
En postopératoire on aura aussi une altération de la ventilation liée à la douleur, qui va réduire le volume courant, une dysfonction diaphragmatique, une altération de la réponse ventilatoire à l’hypoxémie et à l’hypercapnie etc… On voit bien que l’agression pulmonaire liée à l’anesthésie générale est multifactorielle.
Avec toutes ces informations, on se dit qu’il faudrait à tout prix trouver un moyen pour éviter l’apparition des atélectasies. Il n’y a encore pas si longtemps, on apprenait donc à ventiler les patients avec des volumes courant de 10-15 ml/kg sans aucune PEEP. Ces volumes courants importants limitaient donc l’apparition d’atélectasies. Même en chirurgie thoracique en ventilation unipulmonaire, la stratégie était la même.
C’est alors qu’en réanimation on a découvert avec l’ARDSnet la ventilation protectrice dans le SDRA. Le fait de réduire le volume courant, de mettre une PEEP et de faire de temps en temps des manœuvres de recrutement, permettait de réduire fortement la mortalité. Par la suite on a également montré que cette stratégie dite de « ventilation protectrice » était même bénéfique pour la ventilation des patients de réanimation qui n’avaient pas de lésions pulmonaires préexistantes.
On s’est donc demandé si cette stratégie de ventilation pouvait être également bénéfique pour les patients au bloc opératoire qui étaient ventilés mécaniquement, même si cette durée de ventilation mécanique était plus courte.
Dans la suite de mon exposé, on va voir que la réponse à cette question n’est pas aussi franche que pour les patients de réanimation, mais qu’on peut déjà en tirer des stratégies ventilatoires à appliquer au quotidien au bloc opératoire.
La ventilation protectrice au bloc opératoire
- La préoxygénation
Classiquement la préoxygénation se fait en ventilation spontanée au masque pendant au moins 3 minutes afin d’atteindre une Fe02 > 90%. Le but de cette préoxygenation est d’augmenter la concentration alvéolaire en oxygène. Or celle-ci est directement proportionnelle à la CRF. Donc idéalement, une manière d’améliorer la préoxygénation est d’augmenter la CRF ou de limiter sa chute.
Un petit mot sur la Fi02. On a montré qu’une Fi02 à 100% favorisait les atélectasies, donc on pourrait se dire qu’il faille éviter de préoxygéner en 100%. Une étude a montré que baisser la Fi02 à 80% permettait une réduction que de 100 secondes d’apnée non hypoxique. Cependant, le but de la préoxygénation est de se mettre dans des conditions optimales pour faire face à une intubation difficile non prévue. Donc les 100 secondes de perdue seront peut-être les 100 secondes qui nous manqueront lors d’une intubation difficile. Il faut donc continuer de préoxygéner à 100% de Fi02.
Plusieurs articles ont montré qu’une préoxygénation en VNI permettait d’allonger le temps d’apnée non hypoxique (chez le non obèse : 10 min VS 7 min en VS simple ; Chez l’obèse morbide: 3min VS 2 min) ce qui permet de garantir une certaine sécurité lors de l’intubation, notamment si elle est difficile. Par ailleurs la Fe02 > 90% était atteinte plus rapidement qu’en VS, en particulier chez les obèses morbides. La VNI en préoxygenation a également été utilisée chez les patients hypoxémiques en réanimation médico-chirurgicale, ou elle permettait de réduire l’incidence d’épisodes de désaturation per-intubation et d’améliorer l’oxygénation après intubation, comparée à une préoxygénation en VS.
L’autre apport majeur de la préoxygénation est une réduction des atélectasies après induction de l’anesthésie générale chez des obèses morbides, identifiée sur un TDM (augmentation des atélectasies de 10% après induction si préoxygenation en VS, par contre pas de différence si préoxygénation en VNI avec 1,7 % d’atélectasies avant et après induction). Cette réduction des atélectasies allait de pair avec une amélioration de l’oxygénation en utilisant la VNI, objectivée sur des gazs du sang après l’induction.
Ces données ont été confirmées par E.Futier et al. Ils ont préoxygéné des patients obèses (BMI >40) prévus pour de la chirurgie bariatrique, avec un Vt de 6-8ml/kg de poids idéal théorique, une PEEP à 6-8 cmH20 avec une Pression Inspiratoire limite à 18cmH20, une Fi02 à 100% pendant 5min. Après intubation ils ont trouvés une Pa02 et une CRF plus importante dans le groupe VNI par rapport au groupe VS. Par ailleurs la PetC02 était significativement plus basse dans le groupe VNI par rapport au groupe VS, ce qui peut laisser entendre un effet de recrutement de zones atelectiasiées qui participait à l’espace mort. Leur étude ne s’arrête pas là, car ils ont aussi intégré des manœuvres de recrutement mais j’en parlerai plus loin.

Résultats sur la CRF (A) et sur la Pa02 (B) en fonction d’une préoxygénation en VS (CON) ; en VNI seule (NPPV) ou en VNI +recrutement alvéolaire (NPPV+RM). D’après E.Futier et al. Anesthesiology 2011
Concernant les femmes enceintes, je n’ai pas trouvé d’études évaluant une préoxygénation en VNI par rapport au masque simple. Peut-être est-ce à cause du risque théorique de distension gastrique. Or, la pression inspiratoire limite permettant d’éviter l’insufflation d’air dans l’estomac est de 20cmH20. D’autant plus que la VNI pourrait permettre d’accélérer la préoxygenation dans ce contexte d’urgence obstétricale ou on a pas forcément le temps de faire 3 min de préoxygénation ou les 4 Capacités Vitales en 30 secondes qui ne sont pas forcément optimales ( fuite du masque, débit insuffisant etc….).
Récemment est paru, dans Critical Care Medicine, un article évaluant l’intérêt des canules nasales à haut débit (type Optiflow) pour la préoxygenation des patients de réanimation hypoxémiques. Les auteurs montrent que cet outil permet de limiter les épisodes de désaturation pendant l’intubation comparé à une préoxygénation au masque simple (2% VS 14%). Je n’ai pas trouvé d’études le comparant avec la VNI.
Par ailleurs, cet outil a été évalué en réanimation pour le support ventilatoire du SDRA, OAP, Pneumopathies, BPCO, en pédiatrie et chez les obèses.
On pourrait alors imaginer transférer cette technique au bloc opératoire. On pourrait alors préoxygéner les patients avec l’Optiflow, ce qui d’une part éviterait les problèmes d’adaptation du masque au visage du patient, d’autre part ça nous permettrait d’avoir les mains libres. On pourrait même imaginer d’utiliser l’Optiflow dans les cas d’intubation difficile. On le laisserait en place pendant l’intubation, ce qui, peut-être, apporterait un flux d’oxygène pendant l’intubation et pourrait peut-être augmenter la durée d’apnée non hypoxique. Je n’ai trouvé aucune étude sur l’utilisation de l’Optiflow au bloc opératoire.
Enfin, on ne peut pas parler de préoxygénation sans parler de la position. Il a été clairement démontré que le décubitus dorsal réduit la CRF et que mettre les patients en proclive 20-30° pour la préoxygénation augmente le temps d’apnée non hypoxique (même pour les patients non obèses). Cet effet cependant ne semble pas être retrouvé chez les femmes enceintes, probablement à cause de la compression diaphragmatique induite par l’utérus gravide.
- Le Volume Courant et la PEEP
Comme on l’a vu plus haut, il y a plusieurs années, les patients étaient encore ventilés avec un Volume courant de 10-15ml/kg. Suite à la découverte de la ventilation protectrice dans le SDRA, on a voulu réduire les volumes courants au bloc opératoire.
L’étude de Treschan et al. parue dans le BJA en 2012 a évalué l’utilisation d’un Vt de 6ml/kg de poids idéal VS 12ml/kg de poids idéal avec PEEP 5 et Fi02 50% chez 101 patients ASA >/= à 2 prévus pour une chirurgie abdominale en laparotomie d’une durée >/= à 3h avec une anesthésie péridurale combinée à l’AG. Ce qu’ils ont trouvé est intéressant : dans le groupe « High Vt » de 12ml/kg, ils ont trouvé un rapport Pa02/Fi02 et une compliance plus élevés que dans le groupe « low Vt » de 6ml/kg. En plus dans le groupe « High Vt » il y avait moins d’atélectasies objectivées sur la Radio de thorax postop et la Pa02 à J+5 était plus élevée que dans le groupe « low Vt ».

Résultats du rapport Pa02/Fi02 en fonction d’une ventilation à haut volume courant (Bleu) et bas volume courant (vert) et une PEEP à 5 cmH20
D’après Treschan et al. BJA 2012
C’est un résultat étonnant, finalement ventiler les patients avec des gros volumes courants fait mieux que de les ventiler avec une stratégie dite « protectrice » ?
C’est alors que paraît un article dans le NEJM en 2013 écrit par E.Futier et al. qui évalue une stratégie de ventilation non protectrice (on l’appellera groupe VNP) avec un Vt de 10-12ml/kg poids idéal sans PEEP VS une stratégie de ventilation protectrice (Groupe VP) avec un Vt de 6-8ml/kg de poids idéal avec une PEEP de 6-8 et des manœuvres de recrutement toutes les 30 minutes après intubation. Le contexte de l’étude était de la chirurgie abdominale (laparoscopie ou laparotomie) élective d’une durée >/= à 2h chez 400 patients non obèses dans 7 hôpitaux français qui avaient un risque de complications respiratoires > 2 (calculé sur un index de risque de pneumopathies postop validé). Le critère principal était un score composite de complications respiratoires et extra-respiratoires à J+7. Ils ont trouvés que dans le groupe VNP il y avait significativement plus de risque de complications respiratoires et extrarespiratoires avec une durée moyenne de séjour plus longue que dans le groupe VP (la mortalité était la même). Donc une ventilation à haut volume courant sans PEEP faisait moins bien qu’une ventilation à petit volume courant avec une PEEP et des manœuvres de recrutement.

Courbe Kaplan-Meier de prédiction de l’occurence de complications respi et extra-respi . D’après E.Futier et al. NEJM 2013
Se pose alors la question : et si les effets bénéfiques de la ventilation protectrice n’étaient que liés à l’utilisation d’une PEEP « modérée » ?
En 2014, 2 études sont parues dans le BJA, ont mis un peu de lumière sur ce débat. L’une d’elle était une étude rétrospective observationnelle monocentrique sur 29 343 patients opérés sous AG. Les patients ventilés avec un Vt de 6-8ml/kg avaient une mortalité augmentée à 30 jours par rapport à ceux ventilés avec un Vt de 8-10ml/kg, sachant que la PEEP moyenne dans les 2 groupes était de 4 cmH20. Le fait d’avoir une compliance basse était aussi un facteur de risque, et même après appariement en fonction de la compliance, on retrouvait les mêmes résultats sur la mortalité entre Vt bas et Vt élevé. Alors bien sûr c’est une étude rétrospective et on ne connait pas les causes des décès (peut être que cette surmortalité n’a aucun lien avec la ventilation peropératoire) mais on a quand même une cohorte de 29 000 patients, ce qui permet de se poser la question de l’intérêt de la PEEP pour la ventilation peropératoire.
L’autre étude , est une étude observationnelle prospective sur 40 patients endormis pour une chirurgie ORL et ventilés avec un Vt de 6-8ml/kg de poids idéal théorique et une PEEP à 5 que l’anesthésiste pouvait modifier en peropératoire. Les auteurs ont analysés les courbes pression-volume et ils ont trouvés qu’avec cette stratégie ventilatoire on pouvait observer fréquemment un phénomène d’ouverture/fermeture cyclique des alvéoles avec baisse de la compliance, qui s’améliorait dès qu’on augmentait la PEEP à 7 ou plus. Cette étude, même si elle est observationnelle sur un petit collectif de patient, renforce l’idée qu’une stratégie ventilatoire avec un Vt de 6-8ml/kg de manière isolée n’est pas utile, sauf si elle est associée à une PEEP « modérée ». Par ailleurs, certains patients qui avaient une PEEP à 5 n’ont pas présenté de phénomène de dérecrutement, ce qui laisse aussi penser que la PEEP doit être adaptée au patient.
On peut aussi citer cette étude de Severgnini et al. parue dans Anesthesiology en 2013 qui évaluait une stratégie de ventilation standard avec un Vt de 9ml/kg sans PEEP à une stratégie protectrice avec un Vt de 7ml/kg, une PEEP à 10 et des manœuvre de recrutement après intubation, avant extubation et après chaque déconnexion du respiratoire. La population d’étude était des patients non obèses (n=55) sans comorbidités cardio-respiratoires (exclusion BPCO, asthmatique) prévus pour une chirurgie abdominale en laparotomie d’une durée >/= 2h sous AG + Péridurale. Le critère principal était le changement avant/après opération du mCPIS (modified Clinical Pulmonary Infection Score). Le mCPIS était plus bas à J+1 et J+3 dans le groupe ventilation protectrice. Par ailleurs les complications respiratoires étaient plus fréquentes dans le groupe ventilation standard avec une Sp02 et une Pa02 plus basse à J+1 et J+3 dans ce groupe. Il n’y avait pas de différence sur la durée d’hospitalisation ni sur les complications extrapulmonaires.
Donc on a bien l’impression que la PEEP est primordiale dans la protection du poumon en peropératoire. Cependant on n’arrive pas à faire la différence entre effet de la PEEP et effet des manœuvres de recrutement sur les complications respiratoires postop. Il faudrait faire une étude ventilation protectrice avec PEEP « modérée » et 2 groupes : avec ou sans manœuvres de recrutement.
En Aout 2014 est parue dans le Lancet l’étude PROVILHO. C’est une étude contrôlée randomisée en double aveugle, multicentrique (30 hôpitaux européens, nord et sud-américains) qui a inclus 900 patients non obèses, avec un risque intermédiaire ou élevé de complications respiratoires selon les critères ARISCAT, prévus pour une chirurgie abdominale en laparotomie. Il y avait 2 groupes : un groupe PEEP haute avec une PEEP à 12 et des manœuvres de recrutement, et un groupe PEEP </= à 2 et sans manœuvres de recrutement. Tous les patients étaient ventilés avec un Vt de 8ml/kg de poids idéal théorique. Il y avait une amélioration de la compliance dynamique et l’oxygénation en peropératoire dans le groupe PEEP 12, mais aucune différence entre les 2 groupes sur les complications respiratoires postopératoires. En plus dans le groupe PEEP 12 les patients avaient plus d’instabilité hémodynamique et requéraient plus de vasopresseurs. Il n’y avait pas de différence sur le saignement ou le taux de transfusion.
La principale critique qu’on peut faire, c’est que le niveau de PEEP utilisé est beaucoup trop grand. Habituellement on utilise jamais de tel niveau de PEEP sauf dans le SDRA (et encore que dans les formes modérées à sévères et chez les obèses). Peut-être que ce haut niveau de PEEP provoque une surdistension des alvéoles, qui comme on l’a vu, est aussi responsable de VILI, avec un volotraumatisme et un relargage de cytokines pro-inflammatoire. Une des seules conclusions qu’on peut en tirer, c’est qu’appliquer une PEEP à 12 n’est pas bénéfique en chirurgie abdominale chez des patients non obèses, même avec l’utilisation d’un petit volume courant. Il faut probablement se cantonner à une PEEP entre 6-8 cmH20.
Plus qu’appliquer un niveau de PEEP à l’aveugle, il faudrait arriver à individualiser le niveau de PEEP pour chaque patient. Une étude de Ferrando et al. parue dans Anesth Analg en 2014 a montré que lorsqu’on adapte le niveau de PEEP en fonction de la Pa02 chez des patients de chirurgie thoracique, le niveau de PEEP moyen est de 10 cmH20 contre 5 cmH20 dans le groupe PEEP standard, avec un gain sur l’oxygénation et la compliance statique.
- Les manœuvres de recrutement
On a parlé des stratégies pour augmenter la CRF en périopératoire : VNI en préoxygénation, utilisation d’une PEEP « modérée » en peropératoire. Le dernier volet de l’optimisation de la ventilation peropératoire est l’utilisation de manœuvres de recrutement. Même si aucun consensus n’existe sur la meilleure façon de les réaliser, elles se sont montrées utiles dans plusieurs situations. Il semble tout de même que la stratégie consistant en l’utilisation du ballon pour réaliser ces manœuvres doit être abandonnée, étant donné qu’on ne contrôle pas totalement la pression exercée. Il est préférable de réaliser ces manœuvres à l’aide du respirateur, soit en passant en ventilation spontanée et en réglant la PEEP, soit en utilisant le mode pression contrôlée et en l’augmentant progressivement pour atteindre une valeur de 30-40 cmH20 pendant 30-40 secondes. Certains utilisent aussi une stratégie qui consiste en l’augmentation progressive du volume courant jusqu’à atteindre les valeurs de pressions inspiratoires ci-dessus (les différentes stratégies de recrutement sont détaillées plus bas)
Comme je l’ai déjà dit, en général, les études évaluent PEEP « modérée » ou « élevée » AVEC des manœuvres de recrutement. On peut donc difficilement faire la part des choses entre effets bénéfiques liés uniquement à la PEEP et ceux liés aux manœuvres de recrutement.
Cependant dans l’étude d’E.Futier et al. que j’ai cité dans mon chapitre sur la préoxygénation, en plus de préoxygéner les patients en VNI VS Masque simple, les auteurs ont réalisés des manœuvres de recrutement après intubation. Ils ont montrés que les manœuvres de recrutement permettaient un gain supplémentaire significatif sur tous les paramètres qu’étaient la Pa02, la CRF, la compliance et les pressions inspiratoires par rapport à une préoxygénation en VNI seule sans manœuvres de recrutement. Je rappelle que la population d’étude étaient des patient avec un BMI >/= 40 prévus pour une chirurgie bariatrique. La manœuvre de recrutement consistait en l’application d’une pression positive continue de 40cmH20 pendant 40 secondes après début de la ventilation mécanique, et un arrêt de la manœuvre si chute de la PAs > 20%.

Evolution des paramètres spirométriques après VS (CON) ; VNI seule (NPPV) et VNI+Recrutement alvéolaire (NPPV+RM)
Une étude parue dans Anesthesiology en 2013 a évalué l’effet de manœuvres de recrutement et de la PEEP sur la mécanique respiratoire et la pression transpulmonaire mesurée à l’aide d’un ballon oesophagien. 29 patientes non obèses sans pathologies cardio-respiratoires, prévues pour une chirurgie gynécologique en laparoscopie, étaient inclues. Elles étaient ventilées avec 8ml/kg de Vt sans PEEP initialement. Après insufflation du pneumopéritoine, les auteurs ont réalisé une manœuvre de recrutement qui consistait en un réglage de la pression inspiratoire (au-dessus de la PEEP) à 20cmH20 puis une augmentation progressive de la PEEP jusqu’à atteindre une Pression inspiratoire à 40 cmH20 pendant 6 respirations. Puis la PEEP était redescendue à 5 cmH20 jusqu’à la fin de l’intervention. Les mesures peropératoires montraient une diminution de la compliance après insufflation du pneumopéritoine et après mise en Trendelenburg, compliance qui revenait aux valeurs de bases après manœuvre de recrutement. Par ailleurs on observait également une amélioration du rapport Pa02/Fi02 et de l’hypercapnie après manœuvre de recrutement. Aussi l’index cardiaque chutait en moyenne de 20% pendant la manœuvre mais revenait vite à la valeur de base. Dans cette étude on peut critiquer le fait que le nombre de patients étaient faible et que la position du ballon œsophagien n’était pas contrôlée après insufflation du pneumopéritoine. Mais l’effet sur l’oxygénation et la capnographie sont bien présents.
En novembre 2014 est parue, dans Resp Care, une revue systématique sur les manœuvres de recrutement alvéolaire sous anesthésie générale. 6 études ont été incluses. Elles utilisaient soit une augmentation progressive du volume courant jusqu’à une pression de plateau de 30cmH20, une augmentation de la PEEP jusqu’à 20 cmH20 ou une manœuvre manuelle au ballon pour avoir une pression inspiratoire continue de 40cmH20 pendant 30-40 secondes. Au final, les manœuvres de recrutement permettaient une augmentation de la Pa02 et de la compliance. Les stratégies de recrutement étaient similaires au niveau de leur efficacité.
On peut donc dire que les manœuvres de recrutement apportent un bénéfice sur l’oxygénation et la compliance pulmonaire en peropératoire. Pour ce faire une manœuvre de recrutement nécessite 3 choses : 1) De la pression : globalement il faut atteindre une pression inspiratoire continue de l’ordre de 30-40cmH20 2) Du temps : il faut maintenir la manœuvre de recrutement sur plusieurs cycles inspiratoires, globalement 6-10 cycles correspondant à 30-40 secondes 3) Il faut maintenir le recrutement : faire une manœuvre de recrutement ne sert à rien si elle ne dure pas dans le temps, il faut maintenir les alvéoles ouvertes. C’est pour ça que l’utilisation d’une PEEP « modérée » est primordiale dans ce cas. La PEEP seule ne peut pas à ouvrir les alvéoles (c’est le boulot de la manœuvre de recrutement) mais elle sert à garder l’alvéole ouverte en s’opposant aux forces de rétraction.
Donc les manœuvres de recrutement suivis d’une PEEP ont un bénéfice sur l’oxygénation et la compliance. Cependant on ne sait pas si ce gain d’oxygénation et de compliance lié aux manœuvres se traduit par une amélioration de l’état respiratoire en postopératoire. Cette question nécessiterait des études contrôlées dans le futur !
Le dernier volet de la ventilation au bloc opératoire est celui de la VNI postopératoire après extubation. Cependant mon article est déjà très long, et ce thème est très vaste, je le réserve donc pour une prochaine fois. Cependant je vous mets ici le lien vers les recommandations de la SFAR sur l’utilisation de la VNI. Elle a un intérêt dans plusieurs situations, notamment chez l’obèse, chez les patients opérés de l’aorte thoracique ou abdominale et en postopératoire de chirurgie thoracique et abdominale.
Je rajoute une seule chose : il faut arrêter de vouloir mettre les patients à 100% de Fi02 avant l’extubation. Si la Sp02 est correcte il n’y a aucune raison de le faire. Ça serait dommage de gâcher toute cette belle prise en charge ventilatoire en peropératoire pour totalement l’annihiler en salle de réveil. Déjà quand l’infirmière passe la sonde d’aspiration dans la sonde d’intubation pour aspirer les sécrétions, elle le dérecrute à mort, si en plus par derrière on lui met une Fi02 à 100% , les atélectasies vont se recréer et se majorer, tout le bénéfice de la ventilation protectrice sera perdu !!!
Il y a cependant un doute sur l’utilité d’une manœuvre de recrutement juste avant l’extubation, comme le montre cette étude du BJA en 2010. Elle pose la question de l’implication des atélectasies VS la réaction inflammatoire dans la genèse des complications respiratoires postopératoires. Est-ce qu’une atélectasie isolée augmente le risque de complication en postopératoire et faut-il la prévenir avant l’extubation. Moi je pense que le fait de débrancher/rebrancher le tube sur le respiratoire provoque un derecrutement et qu’il est tout de même bénéfique de laisser le temps au patient de recruter ses alvéoles avant de l’extuber.
Il faut aussi avoir en tête, comme dans tout traitement en médecine,qu‘il y a des répondeurs et des non répondeurs. Certains patients ne répondront pas bien aux manœuvres de recrutement. Dans ce cas il ne faut pas s’acharner au risque d’avoir un effet délétère sur l’hémodynamique. Il faut donc toujours essayer d’évaluer l’efficacité de vos manœuvres. Oui mais comment ? … la Sp02 n’est pas un bon indicateur (cf. courbe de dissociation de l’hémoglobine, entre 98% et 99% de Sp02 il peut y avoir une grosse différence de Pa02).

Courbe de dissociation de l’hémoglobine
(sur le plateau supérieur de la courbe: faible variation de Sp02 = grande variation de la Pa02)
Vous pouvez faire des gazs du sang pour évaluer la Pa02 avant et après. Sinon vous pouvez regarder la compliance pulmonaire et voir si elle a augmenté suite à la manœuvre. On peut aussi observer qu’avec les mêmes paramètres respiratoires, la pression de plateau après la manœuvre est plus basse qu’avant la manœuvre. Ceci est un reflet indirect de l’amélioration de la compliance. Si on est en pression contrôlée, on aura une augmentation du volume courant avec le même niveau de pression inspiratoire.
Concernant l’hémodynamique pendant les manœuvres de recrutement, il faut toujours avoir un œil dessus. Une manœuvre de recrutement ne doit pas être réalisée chez un patient hypovolémique ou instable sur le plan hémodynamique…c’est la catastrophe assurée. Si on veut être vicieux on peut imaginer un patient obèse avec antécédent d’HTAP qui désature….que faire ?? (= situation déja vecue). Si on a été logique, on a monitoré l’hémodynamique de ce patient. Donc si on a un monitorage fiable et invasif de l’hémodynamique, il ne reste plus qu’à poser ses c******* sur la table et à lui souffler dans les bronches avec le respi, et voir ce que ça donne !!!
Je crois que je vais conclure : comment ventiler son patient au bloc ?
Après ce très long exposé, je vais enfin pouvoir finir sur une conclusion. Pour remercier les courageux qui se sont accrochés et qui ont tenu jusqu’ici malgré les embûches, je vous fais un résumé de tout mon blabla avec quelques conduites à tenir, que j’ai déduite, pour ma pratique personnelle, de toute cette littérature. Après chacun doit l’adapter à ses convictions et à sa pratique.

Résultats de l’Enquête Ventilop : enquête déclarative sur la pratique de la ventilation peropératoire dans 24 établissements d’Alsace
Avant tout, j’aimerai vous montrer ce tableau qui résume plusieurs études observationnelles sur la pratique de la ventilation au bloc opératoire. Même si pour certaines, ces études date d’il y a 10 ans, elles montrent tout de même que la ventilation protectrice ne fait pas encore l’unanimité et qu’on ventile encore avec des bas niveaux de PEEP, sans PEEP ou avec des très haut volumes courants. Est-ce parce que la durée de ventilation au bloc est courte ? qu’on ne voit jamais les conséquences de la ventilation au bloc, car elles n’arrivent qu’au 3e jour en moyenne ?
Certes, la ventilation protectrice ne doit pas être appliquée à TOUS les patients. Les patients opérés de chirurgie mineure, périphérique ou non invasive n’ont probablement peu de bénéfices à en tirer, voire aucun. Il semble que la ventilation protectrice soit bénéfique sur des poumons déjà précédemment agressés ou qui vont l’être, soit par de la ventilation unipulmonaire, par de l’inflammation, par les conséquences d’une laparotomie ou une laparoscopie. On peut donc dire que cette stratégie ventilatoire va surtout bénéficier aux patients qui vont être opérés d’une chirurgie majeure et/ou longue , surtout si elle est abdominale, thoracique ou cardiaque, et aussi pour les patients qui ont un risque accru de complications pulmonaires : patients obèses, âgés, tabagiques etc…. On peut regretter que dans les études sur la ventilation protectrice, les populations étudiées excluaient souvent les patients BPCO, asthmatiques ou avec des comorbidités cardiaques (pour enlever des facteurs confondants) Théoriquement on ne peut donc pas conclure pour ces patients, mais compte tenu de la physiopathologie de l’agression pulmonaire en peroperatoire, on peut étendre cette stratégie à ces patients-là.
Globalement j’utiliserais la ventilation protectrice chez tous les patients : volume courant de 6-8 ml/kg de poids idéal théorique, une PEEP entre 6-8 cmH20 chez le non obèses et de 10 cmH20 chez l’obèses. Juste après l’intubation j’enregisterais une courbe pression-volume avec une valeur de compliance pour avoir une référence et j’ajusterai la PEEP en peropératoire pour avoir la meilleure compliance possible. J’éviterais d’utiliser des Fi02 trop élevée, même si certaines études montrent qu’une Fi02 élevée peut réduire le taux d’infection postopératoire ( notamment par augmentation de la pression partielle tissulaire en oxygène) mais cela dépend aussi de l’hémodynamique et de la microcirculation au niveau tissulaire. Dans les chirurgies avec laparotomie, coelioscopie et thoracotomie ainsi qu’avant et après ventilation monopulmonaire et chez les obèses, je réaliserais des manœuvres de recrutement après intubation, après insufflation pneumopéritoine/ incision laparotomie ou thoracotomie, avant passage en ventilation unipulmonaire, puis je les réaliserais de manière réguliere /30-60 min et surtout à la fin de la chirurgie après fermeture/exsufflation pneumopéritoine, rétablissement ventilation bipulmonaire. Après transfert en SSPI si toujours intubé, je referais une manœuvre de recrutement et j’extuberais mes patients en pression positive en évitant les Fi02 élevées et les aspirations trachéales intempestives !
Pour ce qui est du cas particulier de la chirurgie cardiaque, la ventilation protectrice a bien entendu son intérêt, d’autant plus que ces patients risquent d’être ventilés de manière prolongée. Concernant la ventilation en per-CEC, la littérature ne semble pas avoir tranchée : il semble que la ventilation pendant la CEC n’aurait pas d’effet bénéfique, au contraire. Par contre l’insufflation passive d’air +/- associée à une CPAP de 5 cmH20 pourrait avoir des effets bénéfiques (moi ça me gêne toujours quand on éteint le respi pendant la CEC…ça me stresse, donc je préfère garder au moins une petite PEEP). Après sortie de CEC, une manœuvre de recrutement est indispensable pour recruter les poumons atelectasiés pendant la CEC.
- Patients Obèses
Comme on l’a vu, ce sont des patients qui ont une CRF réduite à l’état de base. Ils sont donc particulièrement sujets aux atélectasies et à leurs conséquences. Vous avez peut être tous déjà eut un patient obèse qui désature brutalement après l’intubation, Sp02 qui remonte difficilement avec l’augmentation de la Fi02 et finalement le traitement salvateur est un recrutement alvéolaire. D’autre part ces patients sont souvent trop ventilés, parce que le calcul du poids idéal théorique n’est pas fait et que, peut-être dans certains esprits persiste encore la croyance que patient obèse = gros poumon. Du coup ils subissent les conséquences du volotraumatisme et d’une surdistension de leurs alvéoles. Cette idée est totalement fausse, les patients obèses ont des poumons comme les autres, ils ont une « masse » thoracique plus importante qui comprime leurs poumons, et contre laquelle ils doivent lutter. Lors de l’anesthésie ils vont donc particulièrement bénéficier d’une aide inspiratoire par VNI lors de la préoxygénation et de manœuvre de recrutement avec une PEEP élevée pour déplier leurs alvéoles et les aider à résister à la pression exercée par la cage thoracique qui tend à les comprimer.
Le Poids Idéal Théorique
Si on veut faire de la ventilation protectrice, il faut ventiler les patients en calculant le volume courant selon le poids idéal théorique et non le poids réél, au risque de surdistendre les alvéoles. Donc voici les formules à utiliser (sauf si vous avez MedCalc!)
Formule complète du Poids Idéal Théorique:
50 + 0,91 x (Taille (cm) – 152,4) pour les hommes
45,5 + 0,91 x (Taille (cm) – 152,4) pour les femmes
Formule simplifée du Poids Idéal Théorique :
Taille(cm) – 100 pour les hommes
Taille (cm) -105 pour les femmes
Voici la stratégie de ventilation protectrice chez l’obèse:
Préoxygénation :
- En Proclive 20-30°
- VNI avec Aide Inspiratoire QSP 6-8 ml/kg de poids idéal théorique
- PEEP 8-10 cmH20
- Surveiller Pression Inspiratoire QSP < 20 cmH20
- Fi02 100%
Après Intubation
- Manœuvre de recrutement alvéolaire (au choix) puis répétée pendant la chirurgie et avant extubation
- Volume courant 6-8ml/kg poids idéal théorique
- PEEP 10 cmH20 (à adapter selon évolution de la compliance pulmonaire)
- Fi02 40-50% (éviter haut niveau de Fi02)
Après Extubation
- VNI 30-60 min juste après extubation selon les mêmes modalités que celles pour la préoxygénation, excepté la Fi02 que je règlerai à 30%
- Patients prévus pour Laparotomie / Coelioscopie / Thoracotomie
Ce sont des patients à risques de complications respiratoires, du fait de l’agression pulmonaire induite par le type de chirurgie (longue, invasive….). Encore une fois ici, la stratégie de ventilation protectrice a tout son intérêt:
Préoxygénation
- Proclive 20-30°
- VNI avec AI QSP 6-8 ml/kg poids idéal théorique
- PEEP 5-6 cmH20 (j’essaie de mettre une PEEP selon tolérance du patient)
- Fi02 100%
Après intubation, en peropératoire
- Vt 6-8ml/kg de poids idéal théorique
- PEEP 6-8 cmH20 à adapter en fonction de la compliance après laparotomie/insufflation/thoraco….
- Pendant ventilation unipulmonaire : Vt 5-6 ml/kg + PEEP 5cmH20
- Fi02 40-50%
- Manœuvre de recrutement après intubation et après insufflation pneumopéritoine / incision laparotomie. Pour la thoracotomie, je la ferai avant passage en ventilation unipulmonaire
- Apres fermeture laparotomie/ exsufflation pneumopéritoine/ rétablissement ventilation bipulmonaire = nouvelle manœuvre de recrutement
Après Extubation
- VNI pour les patients ayant eu une laparotomie ou une thoracotomie, selon les mêmes modalités que la préoxygénation, excepté la Fi02 = 30%
- Patients tout venant/autres chirurgies
Pour ces patients, qui sont à moindre risque de complications respiratoires, je resterai tout de même sur une ventilation protectrice. J’aime bien préoxygéner en VNI, mais si le patient ne la tolère pas, je la ferais en Ventilation Spontanée. En peropératoire j’utiliserais un volume courant de 6-8ml/kg de poids idéal théorique et une PEEP entre 6 et 8 cmH20. J’observerais les courbes pression-volume et la compliance pour décider d’augmenter/de baisser la PEEP ou de réaliser des manœuvres de recrutement. Je pense qu’il peut éventuellement y avoir un bénéfice pour les patients opérés en décubitus latéral (PTH, Néphrectomie) ou pour les patients mis en Trendelenburg.
- Les manœuvres de recrutement
Pour l’instant il n’y a pas de consensus sur la meilleure façon de faire une manœuvre de recrutement, en tout cas je n’en ai pas trouvé. Donc voici pour vous les principales stratégies de recrutement que j’ai pu recenser dans la littérature. Et toujours penser que les manœuvres de recrutement ne sont rien sans la PEEP. C’est la PEEP qui va permettre de maintenir le bénéfice du recrutement et de garder ces alvéoles recrutées ouvertes. Par ailleurs, inutile de mettre une Fi02 à 100% pour les manœuvres de recrutement. Ça ne sert à rien, l’efficacité de la manœuvre de recrutement ne passe pas par une augmentation de la Fi02 et en plus ça serait contre-productif ! De même, pour un patient qui désature au bloc opératoire, après avoir éliminé les causes habituelles ( débranchement, bronchospasme, bas débit, embolie etc….) au lieu d’augmenter la Fi02 , faites une manœuvre de recrutement. Dans la majorité des cas, ça réglera votre problème, plutôt que d’augmenter la Fi02 qui ne fera que l’empirer !
La CPAP
Cette manœuvre consiste à appliquer une pression expiratoire élevée de l’ordre de 30-40cmH20 pendant 30-40 secondes. Pour ce faire il faut basculer le respirateur en mode CPAP, ou en mode VSAI. Normalement le patient sous AG ne devrait pas avoir de VS. Vous réglez alors la PEEP entre 30 et 40 cmH20 pour une durée de 30-40 secondes. On peut aussi la faire manuellement, quoique peut conseillée, car on contrôle moins bien ce qu’on fait : on met le respirateur en mode VS, on règle la valve APL sur 30 ou 40 et on comprime le ballon pendant 30-40 secondes. On va voir apparaître un plateau de pression respiratoire à 30-40 cmH20 sur le respirateur.
Augmentation progressive de la PEEP en VVC ou en VPC
Ici la stratégie consiste à régler un volume courant fixe ou une pression inspiratoire fixe si utilisation du mode pression contrôlée (par exemple 20 cmH20). Puis on augmente progressivement la PEEP par palier de 5 ou 10 cmH20 (pendant 3 cycles respiratoires à chaque palier) jusqu’à une pression de plateau entre 30 et 50 cmH20 qu’on maintien pendant 3-6 cycles respiratoires puis on redescend aux réglages de base.
Soupirs intermittents
Cette stratégie est plus employée en réanimation. La technique consiste à employer des « soupirs intermittents » transitoires au cours de la ventilation. Ces soupirs consistent en une augmentation transitoire de la pression d’insufflation soit en augmentant le volume courant ou la pression inspiratoire (selon le mode de ventilation). Par exemple Pelosi et al. ont décrit une technique ou pendant 1h, on réalisait 3 soupirs par minute avec une pression de plateau à 45 cmH20.
PEEP adaptée au patient
Sur les respirateurs qui bénéficient de l’affichage d’une courbe pression-volume on peut adapter la PEEP à la courbe du patient. Cette technique consiste à repérer le point d’inflexion inférieur, appelé LIP et de régler la PEEP à 10 cmH20 au-dessus de ce point d’inflexion, de manière transitoire. Cette technique fait partie de l’ « Open Lung Strategy » qui a été développée pour le recrutement alvéolaire des patients en SDRA : on augmente la pression inspiratoire avec une PEEP fixe, jusqu’à voir une augmentation de la compliance dynamique. Puis on diminue la PEEP jusqu’à voir une diminution de la compliance dynamique. Ces 2 valeurs que sont la Pinsp limite et la PEEP limite permettent de régler le respirateur de manière optimale afin d’être en zone de recrutement alvéolaire tout en évitant une surdistension.
Pour une fois je ne ferai pas de partie « Take Home Messages » sinon je vais encore en avoir pour une dizaine de pages et mon ordinateur va s’autoconsumer pour vous éviter ce carnage…
Un grand merci à ceux qui ont tenu jusqu’au bout, j’espère que cette modeste revue de la littérature sur ce sujet vous a été agréable et, je l’espère, même utile. J’espère que maintenant vous chatierez toute personne osant utiliser les réglages prédifinis du respirateur, au nom de la protection pulmonaire et au nom de mon ancien chef d’anesthésie (ca lui fera plaisir)!!
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Enfin, voici un petit clip réalisé par ZDoggMD pour se quitter sur une note musicale.
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hello
je t’avoue que je n’ai pas encore tout lu
mais je mène un combat quotidien pour le réglage « actif » de la FiO2. Pourquoi est-ce qu’on ne la règlerait pas au plus bas pour avoir une SpO2 normale à 97%-99% ?
Est-ce que cette histoire de « réserve » au cas où ça ne serait pas un peu du bullshit ?
Beau travail ! Merci
Salut,
Je suis d’accord avec toi, le rationnel de « on met le max de Fi02 pour avoir une Spo02 à 100% » c’est du n’importe quoi. Ca favorise les atélectasies et ce n’est pas nécessaire. Comme je l’ai dit, le mécanisme d’hypoxémie en perop est bien souvent un problème mécanique avec création de shunt qui ne répondra pas à l’augmentation de la Fi02. Si le patient est suffisamment bien ventilé avec une PEEP « modérée » et des manoeuvre de recrutement, sa CRF devrait être suffisamment « saturée » en oxygène en cas de pépin.
Je pense que cette pratique persiste car on a toujours tendance à être trop prudent , or comme le dit le proverbe « le mieux est l’ennemi du bien ».
Par ailleurs, il y a débat sur la prévention des infections du site opératoire par des haut niveaux de Fi02 , cf cette méta-analyse dans Anesthesiology en 2013 http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23719611
Seulement elle inclus des études assez hétérogènes avec un risque non négligeable de biais.
En parallèle se tiens un autre débat, celui sur l’effet toxique de l’oxygène avec production de composé radiculaire, notamment dans l’ACR etc…
Je pense donc que tu as raison de mener ce combat quotidien en visant une Sp02 un peu plus basse.
le débat sur les infections dite opératoire est clos pour moi : 1) ce problème n’en est pas un 2) y’a un gros essai randomisé qui ferme le débat
http://www.nfkb0.com/2013/02/03/loxygene-est-un-medicament-comme-les-autres/
Merci pour ce lien! Cette étude de Meyhoff et al est antérieure (de 1an) à la méta-analyse parue dans Anesthésiology, mais elle n’a pas été inclue dedans (excepté l’étude initiale de Meyhoff et al parue dans le JAMA en 2009. Même si une méta-analyse a un plus haut niveau de preuve qu’une étude controlée randomisée, le PROXI-trial a en effet inclus une grosse cohorte de patient et on peut en effet dire que de hauts niveaux de Fi02 n’ont très probablement aucun effet sur la réduction des infections postopératoires.
Bonjour ,
j’aurais voulu avoir votre avis concernant le cas du sujet obèse.
la CRF et le VRE sont diminués (c’est prouvé). donc d’après l’article, en position couché, nous assistons encore plus à une diminution de la CRF ?
je pensais justement que le diaphragme était dans une meilleure position quand la personne est allongée ? c’est faux ?
Qu’en est t-il alors de la force des muscles respiratoire en position assise, debout allongée ? où est -elle la plus faible selon vous ?
merci pour vos réponses
Merci pour ce superbe article! Belle synthèse!
Tu n’as pas abordé les réglages du respi (auto flow, temps de plateau, …) as-tu un avis sur le sujet?
Salut Florent
Oui je n’ai pas abordé ces sujets, tout comme la VNI en post-extubation, mon article étant déja très long 🙂
1) Pour l’autoflow c’est un mode qu’on utilise en SSPI dans mon CHU. En effet l’intérêt de ce mode est que le Volume courant est garanti avec une pression inspiratoire la plus basse possible. Ceci a un intérêt pour les patients extubés pour limiter l’insufflation dans l’estomac et pour ceux qui sont en train de reprendre leur VS. Par ailleurs le fait que le débit soit décélérant améliorerait les échanges gazeux. Il a même été recommandé de l’utiliser préférentiellement chez les obèses.
On pourait aussi imaginer l’utiliser pour la préoxygénation. Cependant en peropératoire je pense qu’il n’a pas d’intérêt. Pour la réanimation, je ne peux pas te dire, il semblerait qu’il n’ai pas de réél bénéfice, d’autant plus que le mode de ventilation « phare » est la NAVA, actuellement
2) pour le réglage I/E et le temps inspi : le rapport I/E est de base à 1:2 . Moi j’aime bien l’allonger à 1:2.5 ou 1:3. Pour ça je regarde la courbe de débit expiratoire. Si elle ne reviens pas à 0 avant l’inspiration suivante, c’est qu’il y a une inflation et qu’il faut favoriser le temps expiratoire pour diminuer cette auto-PEEP. On peut aussi le faire en réalisant un plateau expi chez un patient curarisé.
A noter que sur les nouveaux respi de réanimation c’est souvent le débit d’insufflation qu’on règle et qui influe sur le I/E.
Concernant le plateau inspiratoire, il n’a ,a ma connaissance, jamais été démontré qu’il y ait un interêt.
l’intérêt du plateau c’est de le mesurer convenablement !
Merci pour ce bel article! Belle synthèse.
On parle assez peu du mode de ventilation et de leurs réglages: autoflow, temps de plateau en VPC, etc… (Je parle pour un patient lambda, pas de ventilation uni pulmonaire) un avis là dessus?
Désole doublon (mon commentaire et ta réponse n’apparaissaient pas)
Du coup en VC tu règle le plateau à quel pourcentage?
Tu parles du temps de plateau inspiratoire? En général il est de 10% du cycle total.
Ce temps de plateau avait été proposé initialement comme technique « d’homogénéisation pulmonaire » en favorisant la redistribution du volume courant. Or cette redistribution se fait avec des gaz ayant déja participé aux échanges gazeux, donc le bénéfice sur les échanges gazeux était tres faible avec une faible élimination du C02. Cette technique n’est donc plus recommandée (allonger le temps de plateau) d’autant plus qu’elle peut favoriser le derecrutement et les fuites.
Ce qui est plus important c’est de régler le I/E : soit tu règles le I/E et la FR et le respi calcule le temps inspiratoire, soit tu règles de le débit d’insufflation ( au moins 60L/min) et avec le Vt demandé, le respi va calculer le temps inspiratoire.
J’espère avoir pu répondre à ta question!
sinon je dois avouer que je ne comprends pas l’intérêt de l’autoflow… j’ai l’impression qu’en baissant les débits inspiratoires ça augmente le travail respiratoire du patient… peut-être que je suis à côté de la plaque, en tout cas en pratique je n’utilise pas les modes que je ne suis pas sûr de comprendre, et c’est un message que j’aime bien donner :-p
tout d’abord, un grand merci pour ton blog, en tant qu’interne d’anesthésie, c’est une belle mine d’informations!!!
et sinon, je n’arrive pas a comprendre si l’autopep s’ajoute à la pep extrinsèque? j’ai trouvé plusieurs informations contradictoires…
Merci pour ton commentaire pasiphae!!
C’est une très bonne question que tu poses et c’est normal que tu trouves des informations contradictoires. On pourrait penser que PEEP totale = autot-PEEP + PEEP extrinsèque, mais en réalité ce n’est pas aussi simple. Elle ne s’ajoute pas forcément aussi simplement que ça et la littérature ne s’accorde pas encore sur ce sujet, enfin de ce que j’ai vu.
Le seul moyen de mesurer l’auto PEEP est de mettre la PEEP extrinsèque à zéro chez un patient ventilé et curarisé.
excellent travail , treés documenté et complet. merci beaucoup!
Super boulot, merci.
Ça dissipe un peu ma honte de ne jamais faire deux manœuvres de recrutement de la même façon, et pour les remarques sur les excès de la FiO2 100% c’est tellement vrai et j’y pense pas assez ( pas seulement pour les problèmes de recrutements chez les patients intubés ou pas, c’est aussi très décrié dans les phases aiguës où l’hyperoxie est reconnue comme délétère ), ton article va je pense me remotiver pour voir mes FiO2 systématiquement à la baisse, et me baser un peu plus sur la sat.
Enfin la physio et physiopath, super, y’en a jamais trop, merci pour ce boulot de synthèse ciblée.
Très beau travail ! Merci
Excellent article, travail de revue de la littérature très brillant, merci beaucoup pour ce billet très intéressant à lire , bravo
et bravo pour ce blog dont le niveau des articles est vraiment excellent
Merci pour les informations que vous donnez Merci pour l’information, nous avons montré de bien meilleures performances
C’était le cours sur la ventilation que j’aurais voulu avoir en débutant l’anesthésie. Merci pour la revue scientifique.
Merci beaucoup!
Coucou Edvard!
J’ai essayé un petit peu d’appliquer dans mon bloc ce que j’ai lu ici. (je suis interne de premier semestre)
Il s’avére que je ne retrouve pas ou peu ce que tu met dans ton blog concernant la ventilation protectrice.
Sur la manœuvre de recrutement, mes IADEs (gentilles comme tout) mettent la valvent APL a 20, passent en Ventilation au ballon, et font de gros volumes pour expandre le poumon pendant 30 – 40 seconde de facon répétées.
Sur la courbe de pression, je vois bien la pression redescendre a 0 au final.
Je trouve que les techniques que tu évoque ici sont pleines de logique, je trouve cela en effet plein de bon sens d’avoir un objectif de pression continue minimum pour expandre le poumon.
En discutant avec l’IADE, et en lui disant que l’on pouvait faire des manœuvres de recrutement autrement en réglant la PEEP a 30 mmH2O, elle m’as dit que cela lui semblait dangereux et que l’on allait lui « exploser le poumon ».
En y réfléchissant j’ai vu dans la vidéo que tu a posté récemment que la pression de plateau (donc la pression intraalvéolaire) ne devais surtout pas dépasser 30 cmH2O sinon il y avait un risque de barotraumatisme.
Je suis un peu perdu, et j’aimerais bien ton avis (et j’en discuterais avec mes MAR demain de toute facon 😉
Je comprends ton interrogation. La majorité des manoeuvres de recrutement au bloc opératoire se font avec la valve APL sur 30 et maintien d’une pression continue pendant 30 sec (ca sert a rien de ventiler au ballon car a chaque fois qu’on relâche le ballon on derecrute le patient).
En réanimation, mais aussi au bloc opératoire, tu peux le faire d’une autre manière : augmentation progressive de la PEEP à Vt constant tous les 4-5 cycles respiratoires jusqu’à une Pplat 30 cmH20, ou encore augmentation de la Pinsp (si VPC) ou du Vt (si VVC) tous les 4-5 cycles respi jusqu’à Pplat 30 cmH20 sachant qu’à chaque fois il faut laisser une PEEP plus élevée après la fin de la MRA.
Moi perso je fais un petit mix : augmentation de la PEEP (je la met à 10) puis augmentation du Vt tous les 4-5 cycles respi avec à chaque fois je fais un plateau inspi après chaque augmentation du Vt pour bien ouvrir les alvéoles et distribuer la pression de manière homogène.
Qu’ont répondu tes MAR?
Bonjour et merci pour ce super article
Je ne comprends pas le mécanisme de formation des atelectasies par résorption lorsque la FiO2 est trop élevée. Pourrais tu nous l’expliquer ? merci !
Excellent article, travail de revue de la littérature très brillant, merci beaucoup pour ce billet très intéressant à lire , bravo
Bonjour, Etudiante IADE, je vous remercie pour cet article qui facilite mon apprentissage de la physio respi! C’est donc inspirée de vos écrits que je me suis engagée sur un sujet de mémoire qui traite de l’EPP relative à la ventilation protectrice. Pourriez-vous me transmettre votre PDF afin que je puisse k’utiliser comme source pour mes recherches? Si vous avez des suggestions ou commentaires sur mon sujet, je serais ravie de les connaitre. Cordialement.