Le Polytraumatisé : Prise en charge Préhospitalière

14 réponses

  1. nfkb dit :

    je lirai ça attentivement mais de prime abord je pense que la gestion du collier cervical mérite une stratégie différente que le systématisme à tout prix

    regarde un peu ça ainsi que les commentaires
    http://www.scancrit.com/2013/10/10/cervical-collar/
    &
    http://www.scancrit.com/2014/04/02/cervical-collar-r-i-p/

  2. Aruden dit :

    Merci pour les liens!! C’est en effet sur ce site que j’avais lu ça. Je n’avais pas eu la suite de cet article.
    C’est couillu de la part de ces norvégiens! Ils se basent sur des études de faible ampleur et de faible puissance, mais ils ont le mérite d’en parler et d’essayer. Il faudrait des études controlées randomisées plus larges, si ces études sont ethiquement faisables ( collier cervical VS pas de collier).
    Au lieu de trancher OUI/NON peut-être est-il plus logique en effet, de reserver les colliers cervicaux aux patients inconscients ou vitcime d’un AVP à haute cinétique, qui sont plus à risque d’avoir une lésion du rachis cervical.
    Apres ne pas le mettre du tout, il faut avoir un personnel bien formé pour maintenir le rachis en place, sans faire de traction axiale!! De l’autre coté mobiliser le patient pour lui mettre son collier est aussi à risque de mobiliser le foyer de fracture. Une étude dans Ann Emerg Med en 1996 a étudiée l’effet de la mise en place d’un collier cervical : l’élévation de l’occiput de 2 cm augmente significativement le diamètre du canal médullaire en C5-C6 qui est un niveau lésionnel fréquent.

  3. cayetanensis dit :

    Je suis content de lire ici de nombreuses bonnes choses pas nécessairement acquises par tous (en vrac : kétamine, low volume, PEEP, le réchauffement, la contention du bassin ou de l’abdo, les agrafes). Si je me plante vers chez toi, tu as carte blanche !

    J’ai juste quelques réserves sur Crash qui ne correspond pas à notre système de santé, qui est sur-vendue par ses auteurs alors qu’il y a de fortes suspicions d’effets indésirables avec l’acide tranexamique…

    • Aruden dit :

      Merci pour ton commentaire! Mais je ne te souhaite pas une chose pareille, même si c’est dans ma région 😉
      Peux tu préciser pourquoi tu penses que l’acide tranexamique n’est pas adapté?
      C’est une molécule qui coute quasiment rien, qui ne nécessite pas de conditionnement particulier et qui, selon mon avis n’a pas tant d’effets indésirables que ça : a éviter si crises convulsives, insuffisance rénale et ATCD MTEV et thromboses arterielles et sténose carotidienne. Pour les ATCD de MTEV c’est vraiment si c’est récent.
      Ca m’interesserai d’avoir ton avis

  4. cayetanensis dit :

    Les critiques classiques de CRASH-2 :
    – la majorité des inclusions sont dans des pays au système de santé peu efficace pour la prise en charge des polytrauma (transfusion, chirurgie, embolisation, imagerie, etc.) : 4000 malades en Inde, 3000 en Colombie, 2000 en Egypte, 2000 en Georgie, 2000 au Nigéria, 1000 en Equateur, 700 en Indonésie, 500 au Pérou, 500 au Mexique, 500 à Cuba, 200 en Malaisie
    – la population n’est donc pas la notre, comme le montre la mortalité par hémorragie de 35 % dans le groupe hypotendu (j’espère que tu n’as pas ça dans ton hôpital)
    – nombre de malade qu’il faut traiter pour éviter un décès par hémorragie : 121
    D’autres études font état de risques thromboemboliques (ce qui est logique) et l’utilisation de l’acide tranexamique fait l’objet de suspicion d’insuffisances rénales aiguës cognées sur des hémorragies du post-partum.

    Or dans notre expérience de pays civilisé où le malade à rapidement accès à un geste d’hémostase et à une réanimation précoce à base de produit sanguins, la mortalité par hémorragie du polytraum est très faible. Ceux qui ne survivent pas meurent :
    – du trauma crânien
    – de complications infectieuses liées à l’immunodépression post-agressives
    – d’évènements thrombo-emboliques

    Du coup je ne vois aucun intérêt à l’acide tranexamique… (sauf désincarcération ou transport très prolongé prévisible)

    • nfkb dit :

      +1

      je suis content que tu aies fait ces réserve sur l’ac tranexamique… depuis un moment j’entends parler de l’ac tranexamique comme un truc miracle que ça soit en obstétrique ou en traumatologie… chez nous j’ai l’impression que certains seniors ne jurent que par ça et le pire c’est que les internes veulent en faire à tout le monde maintenant !! tiens une oreille saigne en per op (deux gouttes sous microscope) : « -et si on faisait de l’exacyl ??! – non mais ça va pas !!! on caline le chirurgien et on utile nos petits moyens habituels »

      Je n’ai pas vu beaucoup de catastrophe hémorragique dans ma carrière. Y’a la mater qui fait très peur parce que ça va très vite, comme ça, bim ! (au point que j’ai arrêté d’en faire) et y’a les situations où on ne bouche pas le trou.

      J’ai appris la mater dans une grosse mater où l’ac tranexamique est au pinacle des thérapeutiques depuis quelques années. J’ai travaillé avec des collègues qui ont participé à Exadeli et je suis un peu dubitatif… Par ailleurs j’ai vu des troubles visuels après injection.

      En traumato, y’ des drames où on n’y arrive pas. Et à chaque fois dans mes sales histoires c’est l’aorte la fautive. Sur les histoires de bassin foireux je trouve que les embolisateurs font des miracles.

      Bref, je suis comme C je ne me jette pas sur l’Exacyl, sur le sang et les PFC oui, sur l’exacyl bof, ou alors on fait des ROTEM et on me montre la fibrinolyse.

      Le truc qui me fait peur en traumato c’est l’embolie graisseuse. Je m’étais promis de faire un billet sur le sujet un jour mais ce moment n’est pas encore venu, tu vas peut être en parler dans les thérapeutiques… moi ça me stresse les fémurs à cause de ça… tu fais tout le mieux que tu peux et après… syndrome confusionnel dans les étages… convulsions… coma… pas de réveil… horrible… J’ai vu des trucs peu puissants passer sur les corticoïdes et l’albumine, faites vous ça ?

      Des trucs que je voulais dire quand même : les scores c’est bien mais si tout le monde les utilise… pour ça GCS est OK (même si ça ne sert à presque rien) Mais en pratique tu vois bien si c’est tuyau-pas tuyau non ? bref pour moi les scores ça sert à faire des études, j’attends de voir une étude dans un grand centre où un score changera le pronostic des patients.
      Ensuite moi j’aime le scoop & run, surtout sur la traumato. Quand on voit le temps que prennent les désincars, je pense que lorsque l’on a un accès sécurisé, c’est pas l’heure de compter les dents. Pour moi le SAMU a une valeur ajoutée pour le tri des douleurs thos/abdo foireuse.
      Enfin, pour l’hypothermie, moins de remplissage, chauffer à fond le camion et scoop & run 😉

      eye candy pour la route : look for inside combat rescue on you tube

  5. Aruden dit :

    En effet je ne connaissais pas ces détails sur CRASH-2. L’étude a été faite dans 40 pays, mais en effet une partie de ces pays sont des pays occidentaux ( Belgique, Italie, Irlande, Espagne, Canada , UK) et une autre partie sont des pays du tiers-monde, qui n’ont pas en effet la même traumatologie que nous et les mêmes prise en charge.
    Apres je ne connais pas l’incidence du choc hémorragique chez le polytraumatisé en France. En effet c’est dans ce cadre que l’acide tranexamique a eventuellement une utilité. Même pour ceux qui detestent les score 😉 , le Score TASH permet de prédire le recours à une transfusion massive chez le polytraumatisé ( ou la l’exacyl aurait un interet) Nous avons intégré le calcul de ce score dans notre procédure de prise en charge du polytraumatisé.
    Je suis totalement d’accord que maintenant on utilise l’exacyl à tour de bras pour tout et n’importe quoi. La littérature est d’ailleurs un reflet de cette pratique, pleins d’études existent sur l’utilisation dans la chirurgie des sinus, dans les hémorragies meningées, en intra-articulaire dans les arthroplasities, en bain de bouche etc…. Physiologiquement l’interet de l’exacyl est d’enrayer la fibrinolyse, donc son interet réside dans les situations ou il y a une fibrinolyse intense : polytrauma, luxation de la tête fémorale dans les PTH, lachage du garrot dans les PTG, CEC en chir cardiaque, clampage aortique pour les aortes …. en effet quel est l’interet de son action antifibrinolytique pour les hémorragies méningées?? J’essaierai de faire un article sur l’usage de l’acide tranexamique et sur ses effets secondaires

    Pour les scores, je suis d’accord que trop de scores, tue le score! Personnellement je n’ai jamais utilisé le score MGAP, car par note pratique et notre sens clinique, pas besoin d’avoir un score pour nous faire dire qu’il faut ammener ce patient dans un trauma center. Mais peut-être peut il être utile dans les situations limites ( chute en scooter avec fracture du fémur isolé ) ou transferer ce patient dans un trauma center serait « too much » , à ce moment là si le score est en faveur, il permet de dire –> Hopital Periph

    Pour ta question sur corticoides et albumine, je n’ai pas vu passer ces articles ( à part Albios mais qui concerne le choc septique, ou corticus en réanimation)

  6. Mdt dit :

    Le gros intérêt théorique du score de Glasgow c’est de surveiller l’évolution dans le temps du patient, et notamment pendant le transport. Je pense surtout à des situations hors polytrauma, avec des malades transférés secondairement d’un hopital périph vers le centre de référence neurochir et qui sont pris en charge par des médecins pas toujours habitués (dans notre région certains transferts secondaires sont effectués par des médecins généralistes de sos médecins à bord d’une ambulance privée, même pour des malades intubés. Ce qui nous a valu quelques gags…). Au moins le glasgow tout le monde est censé le connaître et ça permet de suivre et de transmettre l’évolutio.

  7. Aruden dit :

    Bonne remarque chère collègue 😉
    En effet il est important de répéter l’evaluation du Score de Glasgow qui permet un suivi de l’évolution neuro du patient. C’est un élément plus fiable et objectif que  » ah bah il est un peu plus somnolent qu’au départ….mais bon le trajet ca a du le fatiguer.. »
    Cependant, il faut encore que chacun sache le faire la même manière : les confusions entre « réponse inappropriée » et « réponse confuse » sont fréquentes, encore plus pour le score moteur du glasgow ou beaucoup confondent la flexion simple et la flexion dirigée à la douleur.
    Par ailleurs, le Score de Glasgow est initialement conçu pour l’évaluation REPETEE neurologique des traumatisés craniens . Sa performance predictive sur la mortalité individuelle est faible. Il n’est pas fait pour être utiliser comme un chiffre invariable, le même score de Glasgow peut correspondre à des états neuro différents et à un risque de mortalité différent. Par ailleurs il n’a pas été conçu pour être utilisé dans un contexte d’urgence , de situation aigue (plutot une surveillance neuro régulière du trauma cranien) en se basant sur un seul calcul
    De plus la reproductibilité inter-observateur est faible surtout en conxtexte aigue.
    Il a au moins le mérite de permettre une évaluation un peu plus objective de : » il dort » et doit être pris en compte avec d’autres éléments ( Un coma glasgow 8 ne veut pas forcément dire que le patient ne peut pas protéger ses voies aérienne et qu’il faille l’intuber.)
    Et il est utile pour une évaluation continue, notamment comme tu le dis pendant les long transports.

  8. PS dit :

    Excellent.
    On commence à devenir dépendant….

    Quelques remarques.
    – Dans le « Take Home Message » : remettre les choses dans l’ordre et commencer par 1/ « Evaluation environnement et mécanismes » etc…
    – Dans l’acronyme ABCDE ; j’aime bien me garder le « F » en plus : Familly – Fratrie (le cas échéant)
    – Le rôle de l’infirmier n’est pas de « scopé – mettre un masque et un collier », c’est le job des SP et de l’ambulancier car c’est de la « mise en condition ». Le job de l’infirmier c’est d’anticiper la prise en charge thérapeutique.
    – On peut regretter qu’en France on soit incapable d’évoquer le polytraumatisé (ou le traumatisme grave) sans commencer à parler des USA. Un peu comme le gars de l’UMP qui nous parle du PS pour commencer son discours sur un autre sujet. Ou alors, faire un article spécifique.
    – D’autant que le système français n’est pas celui que tu décris. En effet, dans la vraie vie, le médecin « transporteur » transmet au médecin régulateur qui lui même transmet au médecin d’accueil qui répond au transporteur, qui ….
    – Autre bémol, dans les pays « Scoop and Run » on INFORME qu’on arrive ; chez nous, on DEMANDE si on peut venir car peut être que le bloc n’est pas dispo….
    – Il manque l’évocation de l’IADE en SMUR, qui peut intuber (entre autre) et laisser plus libre le médecin (Trauma Leader sans réalisation de gestes)
    – A ma connaissance, sans parler du polytraum’ et du rachis cervical, il n’y a rien d’écrit sur la place des dispositifs de vidéolaryngoscopie sur les ISR.

    Merci encore.
    Continue !

  9. Edvard dit :

    Merci pour ton commentaire! C’est motivant pour un blogueur!

    Pour te répondre
    – Bien vu pour le F de ABCDE , comme ça on peut l’intégrer facilement à l’algorithme sans l’oublier (malheureusement c’est quelque chose qu’on a parfois tendance à oublier dans le feu de l’action)

    – En effet ce que j’ai écris comme situation ne colle peut être pas toujours avec les pratiques de tout le monde: Le rôle de l’infirmer est d’anticiper les thérapeutiques, de perfuser , de préparer les drogues. Mais il y a autant de pratique que de SMUR! J’ai vu des SMUR ou il n’y avait pas d’ambulancier, c’est l’infirmier qui conduit, j’ai vu des SMUR ou les vieux ambulanciers mettent les perfs et preparent certaines drogues etc…le plus important est que les tâches soient faite de manière parallèle
    De même pour la transmission d’informations: en France en effet on appel la régul pour transmettre les infos. Mais dans les CHU de Province, il y a en général 1 seul Trauma Center dans le coin, du coup la réponse est implicite. Ce n’est comme à Paris ou on envoie le patient selon les dispos et selon le type de lésions suspectées ( grande garde de neurochir ou pas …)
    Par ailleurs dans mon centre on communique à 3: en general la régul nous préviens que le SMUR est parti sur un polytraumatisé, et c’est très souvent le médecin « transporteur » qui nous appelle directement quand il est sur place. Car dans mon centre le « déchoquage » est intégré au bloc des ugences et les anesthésistes-réanimateurs qui font du préhospitalier sont en grande majorité les mêmes que ceux qui travaillent dans ce bloc des urgences.
    Exception faite pour les SMUR de periphérie qui viennent d’un autre département, mais souvent on arrive à avoir le médecin transporteur au téléphone.

    – Ta remarque est pertinente, je n’ai en effet pas parlé des IADEs qui ont un rôle important dans ce contexte : ils peuvent en effet libérer les mains du médecin (intubation etc…) pour qu’il puisse avoir un peu plus de recul sur la situation.
    Aussi, et souvent malheureusement, ils servent un peu de garde-fou. Dans certains SMUR de Périph les médecins transporteurs sont des intérimaires urgentistes : sans vouloir généraliser, il y a certains cas ou « heureusement » qu’il y a un IADE dans le camion pour pouvoir intuber, faire une séquence rapide etc…( j’ai déja vu le tube enfoncé jusqu’à la garde, un jeune de 30 ans intubé avec que 20mg d’étomidate avec l’IADE qui est obligé de pousser du propofol et de réintuber dès que le médecin a la tête tournée; ou encore une intubation oesophagienne démasquée uniquement à l’arrivée au déchoquage après curarisation, car la sédation initiale n’était « heureusement » pas suffisante et le patient respirait tout seul avec son tuyau dans l’oesophage…..mais il n’y avait pas d’IADE dans ce dernier cas)
    Malheureusement, de plus en plus, il n’y a plus d’IADE dans les SMUR (ca coute trop cher) et l’activité de SMUR est de plus en plus reprise par les urgentistes. Dans mon CHU se sont encore les anesthésistes-réanimateurs qui font du SMUR avec les urgentistes ce qui est bien je trouve. D’un coté nous, en tant qu’anesthésiste-réanimateur, nous sommes souvent confrontés à des problèmes « médicaux » ou de pediatrie dont nous avons plus du tout l’habitude, les urgentistes sont bien plus performants dans ce domaine la, ce qui est logique. A l’inverse pour ce qui est du polytraumatisé, je trouve logique de garder cette compétence pour les anesthésistes-réanimateurs, dans les cas les plus graves: on a plus l’habitude de l’intubation, du choc hémorragique, de la sédation etc….
    Après l’intubation en préhospitalier c’est vraiment pas facile. Je te renvoie d’ailleurs à 3 études qui parlent du vidéolaryngoscope en préhospitalier:
    Cavus E,Callies A, DoergesV, et al.TheC-MACvideolaryngoscope for
    prehospital emergency intubation: a prospective, multicentre, observational
    study. Emerg Med J 2011; 28: 650–3

    Gellerfors M, Larsson A, Svense´n CH, Gryth D. Use of the Airtraq(R)
    device for airway management in the prehospital setting—a retrospective
    study. Scand J Trauma Resusc Emerg Med 2014; 22: 10

    Trimmel H, Kreutziger J, Fertsak G, Fitzka R, Dittrich M, Voelckel WG.
    Use of the Airtraq laryngoscope for emergency intubation in the
    prehospital setting: a randomized controlled trial. Crit Care Med
    2011; 39: 489–93

    Globalement leur performances est assez décevantes, principalement à cause de la difficulté de visualisation lorsqu’il y a du sang ou des sécrétions.
    A ce moment là une laryngo classique avec parfois un Eischmann systématique fait mieux.

  10. Rhazelovitch dit :

    Salut, super texte.

    Concernant la partie pré-hospitalière et pour faire aussi écho à l’article  » Polytraum: bilan initial et damage control « , il y a d’autres gestes potentiellement salvateurs qui sont réalisables sur place, j’en aborderai notamment quelques uns juste après. Tout ceci est pour défendre le principe d’un  » stay and play  » jugé péjorativement par beaucoup, même si c’est une notion inexacte.

    Historiquement, l’ancienne opposition des doctrines  » Scoop and run  » anglo-saxon et  » Stay and play  » français ( ce qui est exagéré… ce terme de french bashing a fleuri pour critiquer la prise en charge des traumas graves français après la mort de Lady Diana, raillant le système SMUR parisien ) tend de plus en plus à s’estomper, les français prenant conscience de l’importance d’aller vite dans certains cas ( voire de paramédicaliser simplement par un IDE certaines sorties SMUR dans certains département ), tout comme en face les anglo-saxons se sont rendu compte de l’importance de médicaliser précocement parfois et en particulier chez le traumatisé grave.
    C’est l’étude FIRST (1) qui a démontré le bénéfice significatif en terme de survie à 30 jours de médicaliser à la phase initiale sur le modèle français les polytraumatisés, de part une orientation précoce de la meilleure stratégie réanimatoire et la réalisation de gestes techniques salvateurs rapides si nécessaires. Ces résultats ont accéléré la tendance en cours de certains pays ( notamment l’Angleterre et l’Italie ) qui historiquement étaient opposés à cette idée de médicalisation préhospitalière, à se doter d’équipes médicalisées héliportées ne s’occupant que des traumas graves ( helicopter emergency medical crew ).

    Concernant l’abord pleural:

    L’exsufflation à l’aiguille de ce qu’on suspecte être un PNT compressif chez un patient en détresse respiratoire et / ou hémodynamique (2), et un geste qu’on ne doit pas hésiter à réaliser.
    C’est un geste très simple, et qui en cas d’échec ou d’indication mal posée ne présente pas un risque majeur ( sur les patients exsufflés à tort puis scannés systématiquements après leur mort, notamment dans les accidents de plongée, on retrouve au maximum un très minime pneumothorax à peine visible et /ou une plaie minime du poumon qui n’a concrètement aucun retentissement clinique ).
    On peut retenir pour le recours à ce geste: détresse respiratoire avec asymétrie auscultatoire ou asymétrie manifeste de soulèvement du thorax.

    A noter qu’il est recommandé par certains auteurs (3,4) de pratiquer une thoracostomie ( pas thoracotomie ) dès le pré-hospitalier sur des pneumothorax manifestes très mal tolérés sur le plan hémodynamiques, sans pose de drain ( en se contentant donc de pratiquer l’ouverture d’abord à la lame puis rapidement à la pince à disséquer et passage au doigt de la plèvre ), avant de couvrir le tout soit d’un pansement trois cotés  » fait-maison  » soit pour les plus prévoyants ou mieux dotés, d’un pansement à valve en attendant le milieu plus propre de l’hôpital où le drain sera posé. Cela ne s’accompagne pas d’augmentation des complications infectieuses et peu rendre un sacré service, cf la série très bien décrite par une équipe de SMUR/trauma team héliportée italienne.

    Par ailleurs et pour ma part, en cas d’ACR traumatique réfractaire depuis dix minutes sur un trauma grave notamment avec trauma thoracique fermé, la thoracostomie bilatérale est systématique, soutenue par la littérature (3) mais assez peu réalisée en pratique, avant un scoop and run le plus rapide pour une conversion en thoracotomie véritable par le chirurgien au déchocage si pas d’amélioration (4). La tendance étant de plus en plus à revenir sur le prétendue  » futilité  » de réanimer de tels patients, notamment à la vue des derniers chiffres de survie dans les centres très expérimentés ( majoritairement américains on s’en doute, Demetriades publiant énormément sur le sujet avec des effectifs totalement hallucinants, le nombre d’ACR sur blessures par balles et trauma divers étant bien plus fréquent chez eux que chez nous ).

    Concernant la coagulopathie:

    – Il est possible de transfuser en extra-hospitalier dans certains départements selon un protocole spécial entendu avec l’EFS ( pour l’instant nos limites sont les PFC… difficile de respecter le ratio 1:1 quand on a pas les moyens de déporter en urgence immédiate des PFC hors de l’hôpital, le plus prometteur restant les PFC militaires lyophilisés reconstituables qui sont encore à l’étude. De même nous ne sortons pas encore le fibrinogène des murs de l’hôpital, même si là aussi les preuves de son bénéfices sont toujours difficiles à établir ).

    – L’exacyl, même si fortement débattu au dessus dans les commentaires, peut être donné instantanément par le SMURiste sur la base des résultats de crash-2, d’autant plus appréciable si incarcération / délais de transferts prévus longs.

    Concernant l’échographie:

    La miniaturisation de l’échographie et la part croissante de SMUR en étant équipés ( et surtout de SMURistes sachant à la réaliser ), ouvre de grandes opportunités notamment dans le diagnostic lésionnel précoce. Un patient instable n’ayant aucune hémorragie extériorisée et ayant des plèvres comme un péritoine sans le moindre épanchement, pourra être fortement suspecté d’une hémorragie du bassin / rétro-P même sans fracture instable évidente à la clinique et encore plus rapidement orientée sur une embolisation ( ou un packing selon l’habitude du trauma center recevant ), de même qu’une tamponnade hémorragique pourra être visualisée instantanément et aboutir à une ponction immédiate une fois arrivé au déchocage ( ça s’est déjà vu ).

    Bref, pour résumer ces quelques notions que je voulais apporter au débat:

    – Médicalisation préhospitalière primordiale, même si la rapidité reste un maître mot.
    – Penser aux gestes simples, salvateurs, permettant parfois dès le préhospitalier une amélioration précoce.
    – L’avenir de l’échographie ++

    (1) Impact de la médicalisation préhospitalière J. Yeguiayan, G. Guarrigues, C. Binquet . BMJ 2010

    (2) Waydhas C, Sauerland S. Pre-hospital pleural decompression and chest tube place-
    ment after blunt trauma: A systematic review. Resuscitation 2007 ; 72 : 11-25

    (3) David JS, Gergelé L, Fontaine O, Levrat A. Exsuflation, Drainage, thoracotomie.
    Urgence. Paris, 2009

    (4) Massarutti D, Trillo G, Berlot G, Tomasini A, et al. Simple thoracostomy in prehos-
    pital trauma management is safe and effective: a 2-year experience by helicopter
    emergency medical crew. Eur J Emerg Med 2006 ; 13 : 276-80

    Références bien faites pour les abords pleuraux ( toutes les ref ci-dessus y sont ), et ACR traumatiques:
    http://www.sfmu.org/Urgences/urgences2009/donnees/pdf/003_david.pdf
    http://www.sfmu.org/Urgences/urgences2010/donnees/pdf/043_david.pdf

    A propos de l’étude First:
    http://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=1&ved=0CCEQFjAA&url=http%3A%2F%2Fwww.mapar.org%2Farticle%2Fpdf%2F885%2FLes%2520enseignements%2520de%2520l%2527%25C3%25A9tude%2520FIRST%2520%2528French%2520Intensive%2520care%2520Recorded%2520in%2520Severe%2520Trauma%2529.pdf&ei=VoLOVKzTCpDlaJulgMgO&usg=AFQjCNG0AscFUF80NIns2h2Q6LsS8-YjvQ&sig2=bnj2SapJsbStgwE6nW2fyg&bvm=bv.85076809,d.d2s

    • Edvard dit :

      Merci beaucoup!!! Très gros commentaire avec plein d’infos et de référence j’aime bien!!

      1) Pour le « Scoop and run » VS « Stay and Play » : en effet ce sont deux notions qui sont opposés et qui opposent deux système de santé différents. Je ne suis pas particulièrement en faveur de l’un ou l’autre , tout dépend de la situations, de la proximité d’un centre hospitalier et de l’état du patient. Pour Lady Diana, pour avoir rencontré le MAR (qui était interne à cette époque) qui l’a prise en charge, elle aurait fait 3 ACR à la suite, récupéré à chaque fois, mais le camion était donc obligé de s’arrêter a chaque fois pour permettre la réanimation. Et puis c’est pas dit qu’elle aurait été sauvée si ils avaient continué à rouler, même pas du tout.
      Le plus important c’est de se mettre en sécurité : sécurisation des VAS, gestes vitaux comme une exsufflation, comme tu le dis, réanimation hémodynamique, agrafages des plaies etc….
      Une fois que c’est fait il faut foncer, on est dans un milieu hostile , il ne faut trop s’y attarder.

      2) Merci pour tes références sur l’exsufflation, c’est vrai que c’est toujours un geste qu’on appréhende, on se dit : si je me plante, LA je lui fais un pneumothorax. Donc on attend toujours la situations critique ultime pour planter l’aiguille. Donc c’est rassurant de se dire qu’en cas de plantage, c’est pas si pire. Et comme tu dis, la miniaturisation de l’échographie en SMUR permettra aussi de rechercher des signes de pneumothorax.
      Je suis beaucoup moins familier avec la thoracostomie et l’ACR traumatique refractaire. Merci pour tes explications sur cette prise en charge.

      3) Pour les PSL et la gestion de l’hémostase dans les camions, j’insiste toujours sur l’agrafages des plaies, j’ai vu trop souvent des saignement majeur sur des simples plaies de scalp, qui aurait pu être éviter en préhospitalier si on avait pensé à agraffer les plaies. Il nous arrive quelques rares fois de sortir avec des CGR 0- , devant un choc hémorragique manifeste.
      Je pense que les PFC militaire lyophilisé auront un bénéfice notable dans cette situation là.
      Pour le fibrinogène, pour l’instant les indications de sa transfusion reposent sur un dosage biologique uniquement et non empiriquement à l’aveugle. Mais peut être que dans certains cas, selon des critères précis, pourrait-on le donner « à l’aveugle » ex: hémorragie de la délivrance.

      Encore merci pour tes explications et tes références!

  1. 24/11/2014

    […] Voici la suite de la série d’articles sur la prise en charge du polytraumatisé. Nous avions d’abord abordé la gestion du polytraumatisé en préhospitalier. […]

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