Back to Physio : Le retour veineux
Tous les jours au bloc opératoire et en réanimation, nous manipulons le retour veineux. Dès que nous remplissons un patient, que nous mettons de la noradrénaline ou que nous ventilons mécaniquement, nous avons une influence le retour veineux.
Qu’est ce que le retour veineux ?
Etant donné que le coeur c’est 2 pompes fonctionnant en série avec le réseau artériel, capillaire et veineux, tout ce qui sort du coeur y revient. C’est une notion fondamentale à comprendre. Le retour veineux est toujours égal au débit cardiaque. Le retour veineux est un débit de sang, au même titre que le débit cardiaque. Donc le débit de sang sortant du coeur est forcément égal au débit de sang revenant au coeur.

Lorsqu’on a compris ça, on comprend que jouer sur le retour veineux est primordial pour pouvoir optimiser le débit cardiaque.
Les déterminants du retour veineux
Quels sont les déterminants du retour veineux sur lesquels nous allons pouvoir agir pour l’optimiser ?
Le retour veineux est un débit. Imaginons une canalisation dans votre logement. Pour qu’il y ait un débit dans cette canalisation, il faut que la pression d’entrée de la canalisation soit supérieure à la pression de sortie. Par ailleurs, le débit à travers cette canalisation va également dépendre du diamètre de la canalisation.

Donc par analogie on peut écrire une équation du retour veineux comme suit :
Retour Veineux = (Psm – POD) / Rrv
Psm : Pression systémique moyenne —> la pression d’entrée (c’est la pression qui règne dans les vaisseaux quand le coeur est arrêté)
POD : Pression de l’oreillette droite —> La pression de sortie
Rrv : Résistance au retour veineux
La différence entre la Psm et la POD s’appelle la pression motrice. Elle doit toujours être positive (donc Psm > POD) afin qu’il y ait un débit.
Cette équation décrit une courbe, qui est la courbe du retour veineux issu du travail de Guyton en 1957 (Guyton AC, Lindsey AW, Abernathy B, Richardson T: Venous return at various right atrial pressures and the normal venous return curve. Am J Physiol 1957, 189:609-615)
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Le point de la courbe ou le retour veineux est nul représente la pression systémique moyenne. En effet, en ce point le retour veineux est nul car la POD est égal à la Psm, il n’y a donc pas de pression motrice.
Lorsque la POD baisse, la pression motrice devient positive et donc le retour veineux augmente de manière linéaire avec l’augmentation de la pression motrice. Jusqu’au moment ou la POD devient négative. Les veines se collabent et le retour veineux ne peut plus augmenter.
La pente de la courbe représente la résistance au retour veineux.
Maintenant qu’on sait que c’est la pression motrice = la différence entre la Psm et la POD qui détermine le retour veineux, on sait que pour augmenter le retour veineux il faut soit augmenter la Psm soit baisser la POD.
On peut représenter le système veineux capacitif sous la forme d’une baignoire avec un orifice de sortie. Le volume de la baignoire représente le volume total avec le volume contraint se situant au dessus de l’orifice de sortie et le volume non contraint se trouvant sous l’orifice de sortie. Le niveau ou se situe l’orifice de sortie représente la POD avec la taille de l’orifice de sortie représentant la résistance au retour veineux. Le niveau d’eau dans la baignoire représente la Psm.

Si ce niveau d’eau est au même niveau que l’orifice de sortie il n’y a pas d’écoulement, le débit est nul (car Psm = POD)
Afin d’augmenter le débit on peut augmenter le niveau d’eau (donc la Psm) soit en remplissant la baignoire (= remplissage vasculaire) ou en réduisant la capacitance de la baignoire tout en gardant le même volume d’eau (veinoconstriction).
On peut aussi jouer sur le niveau de l’orifice de sortie en essayant de l’abaisser (on baisse la POD) pour que l’eau s’écoule plus rapidement. On peut donc mettre des inotropes, du NO, baisser les pressions intrathoraciques afin de faire baisser la POD.

Inotrope positif = on baisse la POD
Le croisement des chemins.
Comme on l’a vu, le retour veineux est toujours égal au débit cardiaque. On peut donc croiser la courbe de Frank-Starling avec la courbe du retour veineux.

Chaque patient à chaque instant se retrouve au point d’intersection de ces 2 courbes dont la forme dépend de l’état de volémie et de la contractilité.
Ainsi, lorsqu’on va jouer sur la précharge ou sur la contractilité, on va se déplacer sur ces courbes ou modifier leur conformation (par exemple, aplatissement de la courbe de Frank-Starling en cas de diminution de la contractilité) et le patient va alors se retrouver sur un nouveau point d’intersection de ces 2 courbes.
Pour chaque modification de l’état hémodynamique on va pouvoir théoriquement tracer de nouvelles courbes et trouver le nouveau point « d’état » ou se trouver le patient.

Pour revoir la courbe de Frank-Starling et son concept en détail, cliquez ici pour la version texte ou ici pour la version vidéo.
Take Home Messages
- Le débit cardiaque est toujours égal au retour veineux à l’équilibre
- Le retour veineux est un débit
- Le retour veineux est déterminé par la pression motrice, qui est la différence entre la pression systémique moyenne et la POD
- On peut soit augmenter la pression systémique moyenne (remplissage, veinoconstriction), ou baisser la POD (inotrope +, baisser les pressions intrathoraciques etc…) pour augmenter le retour veineux
- A chaque instant le retour veineux et le débit cardiaque sont à l’équilibre sur un point représenté par l’intersection de la courbe du retour veineux et de la courbe de Frank-Starling, dont la forme dépend de l’état hémodynamique à l’instant t.